IDHES

Genre et monde carcéral 2020-2021

L’influence des représentations genrées : de la qualification pénale à la vie en prison

DATES

Du 7 décembre 2020 au 7 juin 2021

LIEU

MSH Paris-Saclay
La séance de mai se déroulera par visioconférence.

Les inscriptions sont ouvertes jusqu’au vendredi 4 juin à 14h en cliquant sur le bouton “s’inscrire” à la page de l’événement :

http://msh-paris-saclay.fr/event/seminaire-genre-et-monde-carceral-seance-5-7-juin-2021/

Vous recevrez le lien pour assister au séminaire à distance dans la matinée du 7 juin. Pensez à vérifier vos spams si vous ne le recevez pas.

ORGANISATION

Natacha Chetcuti-Osorovitz. Maître de conférences en sociologie, HDR, Centrale Supélec, ENS Paris-Saclay, IDHES
natacha.chetcuti-osorovitz@centralesupelec.fr


Valérie Icard. Doctorante en science politique, Université de Paris-Saclay ; Ingénieure d’études, CESDIP / INHESJ
valerie.icard@cesdip.fr

Avec le soutien de la MSH Paris-Saclay

PRÉSENTATION

Cette année, pour la quatrième édition du séminaire, nous avons choisi de mettre la focale sur les liens entre « le dehors » et « le dedans » et sur les dynamiques de circulation des normes de genre pour penser l’enfermement contemporain. « La vie en prison [doit être] alignée aussi étroitement que possible sur les aspects positifs de la vie à l’extérieur de la prison», d’après la règle pénitentiaire européenne n° 5. Si cet objectif de normalisation carcérale promeut une relative amélioration des conditions de vie en détention, il invite également à analyser l’institution carcérale en tenant compte de l’ordre social hors les murs. C’est toute l’ambition des interventions présentées cette année.
Deux séances seront consacrées à l’influence des rapports sociaux de sexe sur le fonctionnement du système pénal, considéré au sens large (institutions policière et judiciaire, mais également institutions d’encadrement des jeunes). Il s’agira de mieux comprendre comment les normes de genre interviennent dans le traitement pénal contemporain et dessinent les contours de la population incarcérée. Deux autres séances permettront d’analyser l’importation entre les murs de logiques venant de l’extérieur. On réfléchira ainsi à l’influence des codes de genre dans l’accompagnement culturel en prison. Nous nous intéresserons également à la façon dont l’introduction de logiques marchandes en prison conditionne le parcours matériel des femmes détenues. Enfin, le séminaire se clôturera sur une dernière séance portant sur les convergences et divisions entre les mouvements de lutte féministes et anti-carcéraux. Ici, encore, l’objectif sera d’interroger les liens qui se nouent (ou se dénouent) entre les actions protestataires collectives dans et hors les murs.

PROGRAMME

Lundi 7 décembre 2020, 10 h – 13 h visioconférence (sur inscription préalable avant le 4 décembre, voir ci-dessus)
Système pénal et normes de genre : un traitement pénal genré ?

Cette séance portera sur l’influence des rapports sociaux de sexe sur le fonctionnement du système pénal, de la qualification policière aux décisions rendues par les institutions judiciaires. L’intervention de Sandrine Pons permettra d’apporter un regard historique sur la façon dont les normes de genre influencent le recrutement et le verdict dans le cadre de jugements d’homicide devant une cour d’assises sur la période de 1864 à 1914. Ensuite, l’intervention d’Océane Perona portera les déterminants de la qualification policière des violences sexuelles contemporaines, à partir d’une analyse sociologique des normes sociales et de genre qui interviennent dans l’appréciation policière des récits des plaignantes. Dans la continuité, l’intervention de Véronique Le Goaziou proposera de réfléchir à la façon dont les violences sexuelles, et plus spécifiquement le viol, sont saisies par les instances pénales contemporaines. Elle permettra d’éclairer sociologiquement le faible taux de condamnation des faits de viol. Cette séance vise donc à mieux comprendre comment les normes de genre interviennent dans le traitement pénal et dessinent les contours de la population incarcérée.

Programme :

Présentation de la publication du numéro 6 de la collection ACTES de la MSH Paris-Saclay : « Genre et monde carcéral. Perspectives éthiques et politiques », sous la direction de Natacha Chetcuti-Osorovitz et Patricia Paperman. Présentation par Yara Hodroj (secrétaire générale de la MSH Paris-Saclay), Flavie Lavallée (éditrice à la MSH Paris-Saclay) et Natacha Chetcuti-Osorovitz (MCF, HDR CentraleSupélec et IDHES ENS Paris-Saclay).

Sandrine Pons, Historienne – Professeure certifiée et docteure en histoire FRAMESPA – Université Toulouse 2
Les accusé.e.s d’homicide devant la cour d’assises de la Haute-Garonne (1864-1914) : le recrutement et les verdicts ont-ils un genre ?

Océane Pérona, Politiste – MCF, LAMES, Université Aix-Marseille 
La qualification policière des récits de violences sexuelles


Lundi 8 février 2021, 14 h – 18 h visioconférence (sur inscription préalable avant le 5 février, voir ci-dessus)
Représentations genrées dans le contrôle et l’enfermement des jeunes

Cette séance est consacrée à la construction des regards sociaux posés sur la déviance féminine juvénile et aux réponses apportées à celle-ci. Véronique Blanchard interrogera, dans une perspective socio-historique (période 1945-1975), les processus d’étiquetage des adolescentes qualifiées de « mauvaises filles », en analysant les critères mobilisés, le type de normes enfreintes et les réactions sociales suscitées. Ensuite, l’intervention de Yaëlle Amsellem-Mainguy portera sur les processus de classement et de déclassement des mineures incarcérées, à partir d’une analyse sociologique des normes sexuelles et genrées assignées aux jeunes filles incarcérées dans les prisons pour mineur.es contemporaines. Cette séance vise donc à comprendre comment les représentations genre interviennent dans le contrôle et l’enfermement de jeunes femmes.

Véronique Le Goaziou, Sociologue – Chercheure associée au LAMES
Les viols en justice. Pourquoi si peu d’auteurs jugés ?

Yaëlle Amsellem-Mainguy, Sociologue – Chargée de recherche à l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP), chercheure associée au CERLIS et à l’INED
Le corps en prison : processus et déclassement des filles mineures incarcérées

Véronique Blanchard, Historienne – Responsable du centre « Enfants en justice » de l’École nationale de protection judiciaire de la jeunesse (ENPJJ)
« Mauvaises filles » – Un contrôle genré de la déviance féminine juvénile (France, années 1945-1965)


Mercredi 7 avril 2021, 14 h – 18 h visioconférence (sur inscription préalable avant le 2 avril, voir ci-dessus)
L’accompagnement culturel intra-muros : source d’émancipation ou reproduction des normes de genre ?

Cette séance porte sur l’accompagnement culturel en prison, afin de questionner l’importation et la reproduction des normes de genre entre les murs. La projection du film « cinq femmes », en présence de la Sandrine Lanno, permettra d’apporter un regard artistique sur la façon dont les normes de genre façonnent l’expérience théâtrale et cinématographique en prison. Ensuite, l’intervention d’Audrey Chenu sera l’occasion d’aborder la place des activités culturelles en prison, à partir du récit de son expérience carcérale. Elle présentera une analyse critique de ce type d’activités, tout en démontrant l’importance que revêt l’accès à la culture en détention. Dans la continuité, l’intervention de Laélia Veron proposera, à partir de son expérience d’enseignante en prison, d’analyser la façon dont les normes de genre sont interrogées, réaffirmées et négociées dans les interactions entre enseignant.es et étudiant.es empêché.es.

Sandrine Lanno, Metteure en scène – Directrice artistique de L’Indicible Compagnie
Ça joue ! Présentation et projection du film Cinq femmes (2018)

Laélia Veron, Linguiste – MCF en stylistique – POLEN – Université d’Orléans
Elle m’a dit : “Faut ramasser vos couilles, M. xxx !” Enseigner la littérature en prison d’hommes, en prison de femmes : retour sur une pratique

Audrey Chenu, Slameuse, Animatrice d’ateliers d’écritures – Professeure des écoles en Seine-Saint Denis
Ne me libère pas, je m’en charge !


Lundi 10 mai 2021, 16 h – 18 h 30 visioconférence (sur inscription préalable avant le 7 mai, voir ci-dessus)
Industrie de la punition et effets sur la vie matérielle des femmes en prison

Cette séance portera sur les liens qui se nouent entre système carcéral et logiques économiques. À partir d’une enquête ethnographique menée dans un centre de détention français, Natacha Chetcuti-Osorovitz analysera le continuum de violences de genre auquel sont soumises les femmes prisonnières. Dans ce cadre analytique, elle interrogera le lien entre carcéralisme et capitalisme dans les dispositifs pénaux et leurs incidences dans la vie quotidienne en prison. L’intervention de J. Wang sera l’occasion de proposer une réflexion plus générale sur la relation entre capitalisme et système carcéral aux États-Unis, des années 1960 à aujourd’hui. En analysant l’évolution de l’appareil policier et carcéral à l’aune des logiques économiques contemporaines, son intervention permettra de réfléchir à la pénalité néolibérale.

Natacha Chetcuti-Osorovitz, Sociologue – MCF-HDR CentraleSupélec – IDHES ENS Paris-Saclay
Industrie de la peine, violences de genre et parcours carcéral des femmes

Jackie Wang, scholar, abolitionist, poet, multimedia artist and Assistant Professor of Culture and Media Studies at The New School’s Eugene Lang College
Carceral Capitalism


Lundi 7 juin 2021, 14 h – 18 h
Les mouvements de contestation dans et hors les murs

Cette séance portera sur les luttes anticarcérales et les stratégies de résistance dans et hors les murs, en interrogeant les liens qui ne nouent et se dénouent entre différents mouvements de contestation. L’intervention de Joël Charbit portera sur une histoire comparée des mouvements syndicaux en France et aux États-Unis, nés dans les révoltes carcérales des années 1970 à nos jours. Il analysera l’organisation de ces mouvements de révoltes, notamment les stratégies adoptées face aux autorités pénitentiaires et leurs liens avec les luttes abolitionnistes. Ensuite, l’intervention d’Alaitz Areitio Azpiri reviendra sur son expérience carcérale en tant que prisonnière auto-définie politique basque. Elle proposera une réflexion sur les positionnements féministes et les pratiques de résistance collective et individuelle, qui lui ont permis de tenir en prison. Enfin, Jean Bérard s’interrogera sur les controverses relatives aux usages militants de la justice dans les années soixante-dix. Il analysera plus particulièrement la structure des relations entre critique féministe des violences sexuelles et critique de la prison dans les mouvements militants de cette période.

Joël Charbit, Sociologue – Docteur en sociologie – chercheur associé au CLERSE
Grèves et représentations syndicales en prison : la question de l’organisation dans les mouvements de prisonnier-e-s en France et aux États-Unis

Résumé :
À partir de travaux menés en collaboration avec Gwenola Ricordeau, cette communication tente de retracer la manière dont, dans les périodes marquées par la force des révoltes de prisonnier.e.s, la question de l’organisation de celles-ci s’est posée et les enjeux stratégiques qu’elle n’a pas manqué de soulever, que ce soit dans l’attitude adoptée par ces mouvements face aux autorités du système pénitentiaire ou dans la relation de ces luttes à l’abolitionnisme. L’analyse s’appuiera, pour ce faire, sur une histoire comparée des histoires denses et complexes des mouvements syndicaux nés dans les révoltes carcérales en France et aux États-Unis des années 1970 à nos jours.

Alaitz Areitio Azpiri, ex-prisonnière politique basque – diplômée en psychologie (UPV, Université du Pays basque) et en lettres modernes (Université Rennes 2)
Vivre en prison : un combat quotidien pour ne pas disparaître et continuer à être nous-mêmes.

Résumé :
Dès le début de mon incarcération me suis rendu compte que je ne pouvais pas prendre ce temps comme une parenthèse dans ma vie. Je ne pouvais pas me permettre le « luxe » de ne pas vivre le moment. Pour profiter de la vie dans un trou tel que celui de la cellule et du bâti carcéral, j’ai essayé d’être la plus autonome possible, de ne pas arrêter de prendre mes propres décisions, de ne pas me laisser aller à automatiser mes actions, de me protéger des jugements continus, de ne pas arrêter de réfléchir, d’avancer, de grandir, de prendre plaisir, de gâter celles que j’aime… Bref, de pratiquer le féminisme et la liberté.

Jean Bérard, Historien – MCF – ENS Paris-Saclay – Institut des sciences sociales du politique
La violence de la répression ou l’injustice de l’impunité : histoire d’un dilemme critique

Résumé :
Faut-il demander l’application aux groupes dominants bien souvent impunis des sanctions dénoncées lorsqu’elles s’attaquent aux franges les plus précaires des classes populaires ? De nombreuses controverses contemporaines sur les usages militants de la justice forment des cas spécifiques de cette question générale. La communication propose d’esquisser l’histoire de ce débat militant à partir de la structure des relations entre critique féministe des violences sexuelles et critique de la prison dans les mouvements militants des années 1970.

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